LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
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LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE

Envoyé par mougin 
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
vendredi 1 avril 2016 23:49:46
Je suis également preneur; M'sieur O7 (TM E.B)

Avec mes remerciements anticipés
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
samedi 2 avril 2016 07:56:02
vu la demande, un article aurait du être envisagé.

mais bon, quand le jardinier parle esthétique, les vers se taisent.

cordialement

Ossette philippe
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
samedi 2 avril 2016 12:47:14
Le rapprochement avec Morandi fonctionne très bien, maintenant n'oublions pas que le projet des Becher est minimaliste. Leur refus du titre Anonyme Skulpturen est révélateur de leur approche archi positiviste, ils ne sont absolument pas dans la métaphore et encore moins dans l'hallucination artistique. Ces influences picturales sont strictement formelles : elles résultent plus de comparaisons secondaires que d'autres choses. Le projet était strict : l'objet et la relation établie avec son image, Bernd l'a résumé en une seule phrase "Nous voulions compléter le monde des choses".
Pris isolément chaque photo n'a pas d'intérêt, l'expérience est pauvre, et artistiquement elle n'a aucune autonomie comme souvent en photographie sérielle, mais pas toujours il y a des exceptions à considérer sérieusement. C'est l'organisation des formes qui exalte le regard d'une façon très particulière, et transforme cette expérience de façon unique en son genre.
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
samedi 2 avril 2016 13:06:01
bonjour Philippe ,

tu peux aussi m'envoyer ce texte MERCI !
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
samedi 2 avril 2016 13:35:04
en cours !!!


cordialement

Ossette philippe
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
dimanche 3 avril 2016 01:04:09
GUY LUX OU FIAT LUX ?

JCMM
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
dimanche 3 avril 2016 01:05:32
?

cordialement

ossette philippe
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
dimanche 3 avril 2016 01:47:59
Zoran "Pris isolément chaque photo n'a pas d'intérêt"

Je suis de votre avis. l'aspect sériel du travail est un élément majeur. L'idée de construire des typologies renforce encore la démarche documentaire.
Il est d'ailleurs assez rare de pouvoir voir des photos qui ne sont pas présentées sous forme de typologie. la Wintherthur s'y était aventuré il y a quelques temps, c'était assez moyen, d'autant que les vues étaient prise au grand angle et représenter des entités paysagères industrielles et non des formes. beaucoup, beaucoup moins percutant. Pour dire, que leur travail sur le terrain n'étaient pas la composante essentielle mais en amont et en aval, il fallut faire des choix, des bons choix.

Un point aussi un peu décevant devant les typologies originales, les tirages sont loin de ne pas avoir de défauts, notamment des pétouilles du plus mauvais effet.

On se souviendra aussi de la funeste exposition du C. P Metz qui exposé les clichés à 2,40 de haut dans le noir.
ce qu'on touche à ce moment là, c'est le fond.

Art basel reste un endroit ou l'on peut en découvrir deux ou trois chaque années dans de bonnes conditions de présentation.

cordialement

Ossette philippe
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
dimanche 3 avril 2016 10:50:32
mougin écrivait:
-------------------------------------------------------

> Que pensez-vous de cette notion de "toucher" en
> photographie. En particulier cette notion de
> toucher peut-elle s'appliquer aux images
> pixelisées qui ne sont plus des tirages mais des
> impressions dont les techniques sont proches de
> celles de l'imprimerie ?

Je voudrais d'abord saluer sur ce fil l'intervention de Zoran où il exhorte chacun à regarder les choses de ses propres yeux et, citant Lacan pour Freud, à lire dans le texte. Il déplore avec cette belle image des visiteurs de musées aux casques audio vissés sur leurs oreilles qu'on ne les aide pas à lire dans le texte, et j'en suis profondément convaincu aussi.

J'irais même plus loin pour ma part : je trouve que les trottoirs sont encombrés de gens avec des téléphones et des écouteurs, et que tout cela les éloigne, pour en revenir au point soulevé par Jean-Claude Mougin, du "toucher" du réel.
Je définirais ainsi ce "toucher" comme une relation physique et intellectuelle de communion au Monde et, comme lui, je maudirai une technologie qui éloigne du Monde (tandis que je bénis celle qui actuellement nous met tous en contact...).

Par rapport à l'Ecole Allemande des Becher et à ses origines (Evans entre autres), j'ai toujours trouvé que, si la série aide à comprendre les choix qui président à la création d'une œuvre, elle procède quand même au fond d'un grand désespoir quant aux qualités matérielles de la photographie en tant que medium, surtout pour une génération de contemporains à laquelle les critiques d'art avaient essayer d'apprendre à "communier" avec l'abstrait du XXème siècle. C'est ce désespoir qui oblige le photographe à passer à l'idée d'édition : la photographie isolée n'est plus ainsi une œuvre. En quelque sorte la peinture, dans sa résistance, a happé la matière.
Intérêt commercial de la série aussi, qui travaille dans le même sens : le collectionneur avide d'acquérir l’œuvre photographique est logiquement obligé d'acquérir la série puisque c'est là qu'elle niche. Autrement il n'acquiert que la "marque".

J'ai souvent discuté avec Jean-Claude de la matière photographique, que je trouve personnellement pauvre. Je trouve qu'échapperaient le plus à la pauvreté certains tirages réussis en platine-palladium ou ziatypes et, désormais, les beaux tirages jet d'encre sur papier mat. Jean-Claude a élaboré toute une théorie selon laquelle les tirages platines seraient littéralement en relief, la matière pénétrant dans la trame du papier. Personnellement j'ai toujours un peu souri de cet argument qu'on peut certainement projeter sur un Goya du Musée du Louvre (http://www.eeweems.com/goya/woman_fan.html - allez voir de près les transparences faites par Goya dans la peinture du bras de cette femme, et sans casque audio) mais qu'on ne peut à mon avis guère employer dans le cas du palladium posé sur un papier non transparent...
Ces techniques partagent par contre avec le jet d'encre sur un papier mat un peu fort
- l'absence de brillance qui permet une bonne lecture par le regard, donc une sensation de richesse pour les sens (augmentée en ce qui concerne le jet d'encre par un rendu inouï des couleurs, pour quiconque y présente une forte sensibilité), et
- le sentiment de la qualité du beau papier, belle matière plate comme la surface d'une peau tendue et pourtant légèrement grainée aussi, comme une vraie peau.

C'est probablement cette projection du sens (et Zoran a raison de rappeler l'obligation du sens !) sur une surface plane et légèrement grainée qui donne aussi l'impression de peau. De la même façon nous ne voyons dans le réel de tout ce qu'est un individu que surtout sa peau, lieu de projection de tout son sens, de transformation en image de tout ce que nous croyons connaître, savoir, de ce que nous craignons ou espérons de lui.

L'aspect projection, présent dans l'idée de peau, peut être extrait de l'idée de peau et porté seul en avant. On obtient cet effet avec le collodion sur verre, où on a l'impression que c'est la surface qui vraiment porte l'image (en opposition de ce que dit Jean-Claude Mougin sur l'intérêt de l'image en profondeur dans un platine). Le collodion sur verre est un matériau magnifique, très émouvant, dont le succès de l'effet porte à penser que ce n'est pas tant dans l'idée de peau qu'est le secret de l’œuvre, que dans l'idée de mise en scène réussie d'une de ses composantes, l'idée d'une projection.

Autrement dit je pense qu'il y a la notion de "toucher" physique, dont Jean-Claude est à juste titre un grand contempteur.
Mais il y aurait aussi une notion de "toucher" qui serait conceptuelle, et qui pour être intellectuelle ne nous tarauderait pas moins que l'autre, notion sur laquelle, me semble-t-il joue puissamment le collodion humide.

J'apprécie peu les photographies mates présentées sans encadrement, mode très actuelle qui permet de faire des expos à pas cher et sans casse ni difficulté de transport. Le verre posé sur un tirage mat en diminue peut-être la lisibilité et la jouissance des couleurs (dans le cas du jet d'encre) ; mais la présence d'une vitre fait revenir dans le jeu cette notion de frontière, de peau entre nous et l'autre, entre nous et la photographie. J'aime bien que la photographie comme dans le conte soit visible et lointaine dans son cercueil de verre, et que nous ne puissions que la désirer, la rêver et pas plus que cela l'approcher.

Il y a en fait la peau qui permet le contact ; mais il y a la peau qui repousse, celle qui nous sépare à jamais de l'objet aimé !
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
dimanche 3 avril 2016 15:49:30
"Je voudrais d'abord saluer sur ce fil l'intervention de Zoran où il exhorte chacun à regarder les choses de ses propres yeux et, citant Lacan pour Freud, à lire dans le texte. Il déplore avec cette belle image des visiteurs de musées aux casques audio vissés sur leurs oreilles qu'on ne les aide pas à lire dans le texte, et j'en suis profondément convaincu aussi"

D'accord pour dire avec toi et Zoran qu'il faut en revenir au texte et aux images. Je l'ai souvent dit ici, peu importe les techniques seules les images comptent et dans le cas de Lacan seul le texte de Freud compte, non pas comme d'autres diraient que seul le texte du Coran compte, car lorsque Lacan revient à le lettre de Freud, c'est avec les lunettes d'Alexandre Koyré et ceux de Sartre pour élaborer sa conception du Désir, c'est avec les lunettes d'Henri Wallon qu'il élabore le stade du miroir, c'est avec des lunettes saussuriennes qu'il élabore la notion de symbolique, c'est après la lecture d'Heidegger dont il a traduit l'article "logos" qu'il a prononcé son 3Discours de Rome3 etc...La bibliothèque de Lacan ne se résumait surement pas aux seules oeuvres de Freud .

Même sans casque sur les oreilles nous voyons le monde tel que l'expérience et l'éducation nous ont appris à le voir. L"epoche" phénoménologique n'est pas chose facile, et le retour aux choses mêmes prôné par Heidegger demande une complète dépossession de soi. Pas facile..


"J'irais même plus loin pour ma part : je trouve que les trottoirs sont encombrés de gens avec des téléphones et des écouteurs, et que tout cela les éloigne, pour en revenir au point soulevé par Jean-Claude Mougin, du "toucher" du réel.

"Je définirais ainsi ce "toucher" comme une relation physique et intellectuelle de communion au Monde et, comme lui, je maudirai une technologie qui éloigne du Monde (tandis que je bénis celle qui actuellement nous met tous en contact...)."

C'est un lieu commun dire que la philosophie a privilégié le sens de la vue comme modèle de la connaissance, et cela depuis Platon. il faudra attendre Freud et Nietzche pour que la pensée donne une place à l'écoute. Toutefois d'autres cultures ont fait une place par exemple au sens du goûter. Le penseur musulman et mystique Ibn Ghazali, décrit la connaissance la plus intime de Dieu comme une gustation. Et de fait la gustation est le sens qui donne la connaissance la plus intime de l'objet aimé, "viens là que je te mange" dit-on à l'être aime. Il est un célèbre cannibale japonais qui par amour mangeait ses petites amies hollandaises qu'il conservait au congélateur.Enfin les chrétiens connaissent le truc.

La vision a souvent été rapprochée du toucher, Descartes le fait dans sa "Dioptrique", il y compare le rayon lumineux au baton de l'aveugle, sans compter "La lettre sur les aveugles" de Diderot". Comme l'a amplement montré Merlau Ponty, voir et toucher sont des "sens" réflexifs. Je ne peux voir un arbre que parce que d'une certaine façon il me regarde, c'est bien sûr valable pour une image qui peut me "pointer" dira Barthes... C'est Lacan montrant à Petitjean sur son bateau une boîte de sardines flottant sur la mer, "elle te regarde", lui dit-il en la montrant du doigt. Pour le toucher on ne peut toucher sans être touché et cela dans la plus grande des proximités amicale ou sensuelle., Une image me touche parce que je la sens dans sa plus grande matérialité; comment ne pas vouloir toucher une statue, la matière si physique comme l'est la chair d'un tableau de Julian Freud. Au contraire la simple vison, qui peut se contenter d'une simple reproduction, me donne plus accès à l'ordre de la représentation, au "studium" aurait dit Barthes, Cette connaissance, cette libido sciendi peut me donner un véritable plaisir, un contentement que connaissent bien les mathématiciens dont on peut envier la jouissance.

"Par rapport à l'Ecole Allemande des Becher et à ses origines (Evans entre autres), j'ai toujours trouvé que, si la série aide à comprendre les choix qui président à la création d'une œuvre, elle procède quand même au fond d'un grand désespoir quant aux qualités matérielles de la photographie en tant que medium, surtout pour une génération de contemporains à laquelle les critiques d'art avaient essayer d'apprendre à "communier" avec l'abstrait du XXème siècle. C'est ce désespoir qui oblige le photographe à passer à l'idée d'édition : la photographie isolée n'est plus ainsi une œuvre. En quelque sorte la peinture, dans sa résistance, a happé la matière.
Intérêt commercial de la série aussi, qui travaille dans le même sens : le collectionneur avide d'acquérir l’œuvre photographique est logiquement obligé d'acquérir la série puisque c'est là qu'elle niche. Autrement il n'acquiert que la "marque"."

Personnellement je verrais bien les Becher dans la filiation d'Atget. Leurs photos, ne me toucent pas, elles ne sont pas fait pour, mais elles m'apportent un plaisir intellectuel certain.

"J'ai souvent discuté avec Jean-Claude de la matière photographique, que je trouve personnellement pauvre. Je trouve qu'échapperaient le plus à la pauvreté certains tirages réussis en platine-palladium ou ziatypes et, désormais, les beaux tirages jet d'encre sur papier mat. Jean-Claude a élaboré toute une théorie selon laquelle les tirages platines seraient littéralement en relief, la matière pénétrant dans la trame du papier. Personnellement j'ai toujours un peu souri de cet argument qu'on peut certainement projeter sur un Goya du Musée du Louvre (http://www.eeweems.com/goya/woman_fan.html - allez voir de près les transparences faites par Goya dans la peinture du bras de cette femme, et sans casque audio) mais qu'on ne peut à mon avis guère employer dans le cas du palladium posé sur un papier non transparent...
Ces techniques partagent par contre avec le jet d'encre sur un papier mat un peu fort"
- l'absence de brillance qui permet une bonne lecture par le regard, donc une sensation de richesse pour les sens (augmentée en ce qui concerne le jet d'encre par un rendu inouï des couleurs, pour quiconque y présente une forte sensibilité), et
- le sentiment de la qualité du beau papier, belle matière plate comme la surface d'une peau tendue et pourtant légèrement grainée aussi, comme une vraie peau.


Je me souviens très bien de ton sourire,bien sûr je radote ou bien alors je fais preuve de naïveté. Néanmoins tu ne rapportes pas mon argument de façon absolument exacte, je n'ai jamais parlé de relief mais de profondeur, terme qu'utilisent volontiers les graveurs, et qui implique la profondeur physique des pigments mais aussi dans un sens plus sensible, le fait que l'on entre dans l'image, que l'on s'y plonge au lieu d'un simple survol surtout quand la taille de l'image implique la distance. Si l'on veut comparer un tirage palladium, à un objet plastique, la gravure semble s'imposer plus que la peinture à l'huile. De ce point de vue je placerais le tirage palladium entre l'aquateinte et le burin. Cette dernière technique est celle qui donne le maximum de noir au point précisément de créer un relief.

Un palladium peut parfaitement être posé sur un papier transparent. Peut-être te souviens-tu des magnifiques portraits de Lafolie à Craçais sur du Washi de 8gr. J'utilise actuellement pour des très petits tirages un papier Gampi Bicchu Torinoko qui est translucide et permet de rendre des nuances extrêmement délicates dans les hautes valeurs. Ce Bicchu Torinoko est vraiment ce que l'on appelle un beau papier, et qui n'a rien à voir avec les Awagami industriels bourrés de carbonates pour ne pas parler d'une peau siliconée. C'est un papier de 18 gr fait main par un Trésor National, une merveille qui se caresse.

"C'est probablement cette projection du sens (et Zoran a raison de rappeler l'obligation du sens !) sur une surface plane et légèrement grainée qui donne aussi l'impression de peau. De la même façon nous ne voyons dans le réel de tout ce qu'est un individu que surtout sa peau, lieu de projection de tout son sens, de transformation en image de tout ce que nous croyons connaître, savoir, de ce que nous craignons ou espérons de lui."

"Comparer une image à une peau, ne va pas à l'encontre de mon idée de profondeur,. Le fameux moi-peau de Didier Anzieu nous rappelle tout ce que notre peau peut révéler de notre intériorité, de nos refoulements, de notre inconscient, ce qui va dans le sens ce ce que tu dis.

L'aspect projection, présent dans l'idée de peau, peut être extrait de l'idée de peau et porté seul en avant. On obtient cet effet avec le collodion sur verre, où on a l'impression que c'est la surface qui vraiment porte l'image (en opposition de ce que dit Jean-Claude Mougin sur l'intérêt de l'image en profondeur dans un platine). Le collodion sur verre est un matériau magnifique, très émouvant, dont le succès de l'effet porte à penser que ce n'est pas tant dans l'idée de peau qu'est le secret de l’œuvre, que dans l'idée de mise en scène réussie d'une de ses composantes, l'idée d'une projection.

La peau à ce qu'il me semble ne peut guère se comparer à du verre. imagine un instant une peau transparente, nous serions des écorché vifs.

Autrement dit je pense qu'il y a la notion de "toucher" physique, dont Jean-Claude est à juste titre un grand contempteur.
Mais il y aurait aussi une notion de "toucher" qui serait conceptuelle, et qui pour être intellectuelle ne nous tarauderait pas moins que l'autre, notion sur laquelle, me semble-t-il joue puissamment le collodion humide.

J'apprécie peu les photographies mates présentées sans encadrement, mode très actuelle qui permet de faire des expos à pas cher et sans casse ni difficulté de transport. Le verre posé sur un tirage mat en diminue peut-être la lisibilité et la jouissance des couleurs (dans le cas du jet d'encre) ; mais la présence d'une vitre fait revenir dans le jeu cette notion de frontière, de peau entre nous et l'autre, entre nous et la photographie. J'aime bien que la photographie comme dans le conte soit visible et lointaine dans son cercueil de verre, et que nous ne puissions que la désirer, la rêver et pas plus que cela l'approcher.

Il y a en fait la peau qui permet le contact ; mais il y a la peau qui repousse, celle qui nous sépare à jamais de l'objet aimé !"

Je n'aime pas le verre et pour moi l'image collodion est d'une platitude désespérante, à moins d'utiliser le collodion pour en faire des négatifs; Mai de cela tu ne seras pas surpris.

Une citation de Walter Benjamin pour finir, ce qui n'est pas un argument. "Le verre, ce n’est pas un hasard, est un matériau dur et lisse sur lequel rien n’a prise. Un matériau froid et sobre, également. Les objets de verre n’ont pas d’« aura ». Le verre, d’une manière générale, est l’ennemi du mystère." Duchamp,( on l'avait oublié n'aimait pas ou plus la peinture), il aimait le verre.

Nous n'étions sans doute pas destinés à nous rencontrer, vu tout ce qui nous sépare, mais cela n'est affaire que de goût et de couluers. pour le reste je dis mon amitié.

Jean-Claude



Modifié 2 fois. Dernière modification le 03/04/16 16:25 par mougin.
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
dimanche 3 avril 2016 17:10:27
Bonjour,

Je suis aussi preneur du texte Philippe....
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
dimanche 3 avril 2016 18:44:57
Merci philippe pour le texte, et merci à tous pour la richesse des échanges.

Enfin un fil de qualité, qui engage la réflexion et l'échange de points de vues.

Merci, merci !

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Goéland qui s'gratte le gland, mauvais temps. Goéland qui s'gratte le cul, pas d'beau temps non plus !
(Proverbe breton)
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
dimanche 3 avril 2016 20:16:06
feumoyen : c'est fait.

cordialement

ossette philippe
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
dimanche 3 avril 2016 21:22:19
ossette philippe écrivait:
-------------------------------------------------------
> feumoyen : c'est fait.
>
> cordialement
>
> ossette philippe


Documents reçus !

un grand merci pour vous :)
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
lundi 4 avril 2016 17:25:39
Merci pour ce document sur les Becher,
Même si celui-ci ne fait que confirmer des infos déjà glanées à droite à gauche.

Pour la question du toucher, le toucher avec la vie elle-même, calmement et sans filtre, est de mon côté une sorte de credo intemporel.
Le propos de Zoran, regarder les images, les regarder dans leur complexité, même si un regard est très incomplet,
Tout cela me convient parfaitement.

Pour les images, tant du côté lecteur que du côté créateur, je vois trois catégories et c'est cela que je vais percevoir au premier plan. Les images tableaux, qui prolonge le schéma du peintre et en regard propose une question qui s'inscrit dans l'histoire de l'art. Les images séries, qui à l'image des Becher racontent une histoire, le récit peut durer tout une vie. Puis enfin, ou hélas, la modernité, le flux d'image, qui par leur grand nombre écrasent l'histoire.

A l'intérieur de ces familles, il y a le projet, la relation projet procédé, procédé projet, les procédés nobles, d'autres moins noble, mais c'est sans importance, l'importance à mes yeux c'est la cohérence.

La série du D Day de Capa en roto typo sur papier journal, Moonrise de AA tirage contact sur chlorobromure, les trois paysans de Sander en Platine et petit format et qq portraits de JR du jet d'encre sur du papier très ordinaire collé sur une façade à la colle à affiche.

Le toucher, n'est pour ma part qu'une cohérence et non un procédé.
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
lundi 4 avril 2016 21:23:49
Bonjour à tous,

J'ai fait quelques essais il y a pas mal de temps de platine sur papier calque.

un portrait.

c'est une expérience visuelle à part.

Je ne dis pas ça pour me faire mousser: le négatif (13x18) n'était pas de moi mais trouvé... les années 50 je dirais peut être avant guerre.

le grain du calque ne disparaît pas par transparence et du coup ça crée une sorte de vibration avec le grain de la peau du modèle. Personnellement je trouve ça magnifique. j'ai jamais vu une matière photographique comparable. Peut être est-ce tout simplement cette rareté, ce jamais vu qui me subjugue.
Mais je parle d'expérience de voir, une matière photographique pas d'un projet photographique puisqu'il n'y en avait pas.

Autre expérience unique:
là encore je ne parle pas de projet photographique mais uniquement de matière: c'est le papier velour de chez Gaevert. Je n'ai pas retrouvé de doc sur le process de fabrication de ces papiers mais c'est assez particulier.

à l'observation sous microscope on y voit comme un papier dont les fibres auraient été soulevées (imaginez survoler au dessus de la canopée d'une pinède) et chaque fibre se trouve enrobée de gélatine.

La lumière qui tombe là dessus se trouve absorbée et captée. Cependant les zones sombres bourrées d'argent peuvent perdre de leur densité suivant l'orientation du papier par rapport à la lumière incidente et le regardeur car elles miroitent. Ce papier est plutôt mat.

A propose de l'émotion du collodion j'aimerais bien voir les originaux de la série de portrait de Sally Mann au collodion.

mais bon je m'éloigne de la question du toucher en rapport avec une image pixelisée.

Bonne soirée à tous

Romain
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
mardi 5 avril 2016 01:13:17
Ili y a trente ans de cela j'ai acheté un carte postale (photographie) faite sur ce papier velours Gevaert au Musée Thyssen-Bornemisza qui se trouvait à cette époque à Lugano. Elle représente le tableau de Domenico Ghirlandaio, Giovanna Tornabuoni. C'é"tait le tableau préféré du Baron Thyssen. Il en avait fait faire des reproductions et des tirages par un artisan photographe du coin. La collection est maintenant à Madrid.

Je suis d'accord avec toi Romain, je n'ai jamais vu un rendu pareil sur un quelconque procédé connu.

Heureuse époque où les photographes pouvaient utiliser des papiers de cette qualité et de ce rendu. Quel toucher!

A propos de tes tirages sur papier calque, le papier calque étant un papier assez "cheap", tu auras des tirages presque aussi translucides avec le papier japonias Bicchu Torinoko, ou les papiers pur gampi et avec une qualité de matière qui je suis sûr saura te plaira.

A plus

[www.monuniverspapier.fr]



Modifié 4 fois. Dernière modification le 05/04/16 01:29 par mougin.
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
mardi 5 avril 2016 03:13:02
Bonsoir,

Oui j'ai fait aussi des essais sur papier japonais de différents grammage (du 35g au 8g, tengujo, tengujo-kashmir, usumino). Je ne me rappelle plus si j'avais testé le gampi. Mais cela n'a pas la transparence et le grain du calque. Avec lui les fibres ne sont plus du tout visibles contrairement avec les papier japonais même fin. Cependant j'ai fait beaucoup plus d'essais avec du Van Dyke ou cyano avec papier japonais qu'avec du platine. $$$ obligent.

Je fais le lien aussi avec un élément absent de cette discussion qui est probablement du à l'orientation donnée par la question mais quand même je la relie aussi avec un manque d'intérêt en général par les historiens de l'art ou sociologues qui se penchent sur la photo.

c'est la dimension du toucher non plus (encore une fois) du côté de l'image vers le regardeur mais de celle du photographe, du producteur. La place du toucher, du poids, de l'ergonomie, des sensations tactiles qui remplissent l'activité du photographe. Elle est majoritairement absente comme si elle ne participait pas au plaisir de faire l'image photographique; comme si le plaisir n'était que le résultat à montrer.
Comme si le toucher dans la pratique est a priori pas en lien avec le choix de faire de la photographie plutôt que de l'argile, ou du fusain...

De même s'il y a une différence entre la photo analogique et numérique, elle est certainement dans la dimension tactile du faire.

Alors pourquoi le toucher et le tactile comme un des moteurs dans la production photographique est-il si peu discuté, questionné? Il y a quelques discours de photographe qui parlent de leur matériel mais je ne connais pas de discours de regardeur qui questionne le lien entre un projet photographique et la dimension jouissive (ou pas) de la cuisine en arrière où le visuel mais bien sur aussi tout le corps est investi. Le toucher en fait inévitablement parti.

Bonne journée à tous

Romain
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
mardi 5 avril 2016 08:55:24
romain écrivait:
-------------------------------------------------------

> Je fais le lien aussi avec un élément absent de
> cette discussion qui est probablement du à
> l'orientation donnée par la question mais quand
> même je la relie aussi avec un manque d'intérêt
> en général par les historiens de l'art ou
> sociologues qui se penchent sur la photo.

C'est tout-à-fait vrai pour la photo, mais aussi d'autres domaines de l'art, la fabrication intéresse peu

> c'est la dimension du toucher non plus (encore une
> fois) du côté de l'image vers le regardeur mais
> de celle du photographe, du producteur. La place
> du toucher, du poids, de l'ergonomie, des
> sensations tactiles qui remplissent l'activité du
> photographe. Elle est majoritairement absente
> comme si elle ne participait pas au plaisir de
> faire l'image photographique; comme si le plaisir
> n'était que le résultat à montrer.
> Comme si le toucher dans la pratique est a priori
> pas en lien avec le choix de faire de la
> photographie plutôt que de l'argile, ou du
> fusain...

Ce n'est pas le même sens de toucher que celui proposé sur ce fil, c'est un peu comme pour les enfants, tout le monde admire le nouveau né, mais personne ne détaille les étapes de fabrication.

> De même s'il y a une différence entre la photo
> analogique et numérique, elle est certainement
> dans la dimension tactile du faire.

Faiblement, la relation analogique / numérique en photographie est peu construite par la pratique, mais surtout par le marketing et la guerre entre les anciens et les modernes, sans lien ni avec la réalité physique, ni avec les résultats.
La plupart des productions de photographie sont hybrides, alternative et non ancienne et encore moins historique.
Ce qui compte de mon point de vue dans cette relation, ce sont les mains intelligentes, et ce n'est pas incompatible avec des phases dites numériques, le numérique est forcement une étape fugitive et non une finalité.

> Alors pourquoi le toucher et le tactile comme un
> des moteurs dans la production photographique
> est-il si peu discuté, questionné?

La marque d'une civilisation du but à atteindre et non du chemin à parcourir

> Il y a
> quelques discours de photographe qui parlent de
> leur matériel mais je ne connais pas de discours
> de regardeur qui questionne le lien entre un
> projet photographique et la dimension jouissive
> (ou pas) de la cuisine en arrière où le visuel
> mais bien sur aussi tout le corps est investi. Le
> toucher en fait inévitablement parti.

Des conversations d'alcôves entre photographes après quelques verres, des souvenirs mémorables ...
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
mardi 5 avril 2016 12:14:26
Romain

Tu n'as pas essayé les gentils, à la différence des kozo, il sont vraiment transparents, encore plus si les cires. Ce sont des papiers vraiment différents particulièrement jouissifs.
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
mardi 5 avril 2016 13:03:54
Bonjour à tous,

Merci Jean-Claude c'est noté. Je ne connais pas les papier gentils.

Henri,

Oui nous sommes d'accord.
Cependant même si le numérique est une étape fugitive ( car on ne va pas reprendre l'argument que finalement le numérique n'existe pas), les outils qui le rende analogique avec lesquels nous travaillons sont différents de ceux du monde analogique. De fait notre rapport tactile est différent, c'est ce que je voulais souligné.

Bonne journée à tous

Romain
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
mardi 5 avril 2016 13:43:54
romain écrivait:
-------------------------------------------------------

> Henri,
>
> Oui nous sommes d'accord.

C'est déjà pas mal ....

> Cependant même si le numérique est une étape
> fugitive

Très fugitive

> ( car on ne va pas reprendre l'argument
> que finalement le numérique n'existe pas)

Inutile, mais le numérique n'a pas d'existence visuelle

> , les
> outils qui le rende analogique avec lesquels nous
> travaillons sont différents de ceux du monde
> analogique.

Les négatifs "numériques" (appellation farfelue, mais à défaut d'autre chose) permettent de régler ce problème rapidement, pour passer des heures des semaines au laboratoire.

> De fait notre rapport tactile est
> différent, c'est ce que je voulais souligné.

Mais juste l'espace d'un instant, comme de regarder l'heure sur un Iphone, cela ne change pas l'écoulement du temps.
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
mardi 5 avril 2016 14:08:35
bonjour,


en tous les cas pour ma part, j'ai découvert le "toucher" avec mon epson chez moi comme un grand
photo RAG 308 gr et AWAGAMI ( testés mais pas convaincu )
j'ai passé 25 ans à "détester" les labo et leurs tirages et je n'ai jamais été convaincu d'une quelconque sensation de toucher ( dans le sens de la profondeur ) sur les procédés argentiques traditionnels Ciba et autres .
à part le nb fait maison bien sûr et encore, je trouve les papier Hahnemühle vraiment au dessus, aujourd'hui j'envisage quitte à faire hurler, une séance d'impression aussi jouissive qu'une séance de labo
;-)

bonne journée
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
mardi 5 avril 2016 14:26:50
stephane.S écrivait:
-------------------------------------------------------
> bonjour,

> j'ai passé 25 ans à "détester" les labo et
> leurs tirages et je n'ai jamais été convaincu
> d'une quelconque sensation de toucher ( dans le
> sens de la profondeur ) sur les procédés
> argentiques traditionnels Ciba et autres .

Je suis un affreux gourmand, j'aime les deux, juste une question de projet

> à part le nb fait maison bien sûr et encore, je
> trouve les papier Hahnemühle vraiment au dessus,
> aujourd'hui j'envisage quitte à faire hurler, une
> séance d'impression aussi jouissive qu'une
> séance de labo
> ;-)

Prendre plaisir à ce que l'on fait, c'est la base du métier
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
mardi 5 avril 2016 19:07:53
Romain

PAPIER GAMPI, c'est le correcteur automatique qui refuse gampi et le remplace par gentil. Gampi=gentil nipon.

JC
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
mardi 5 avril 2016 19:19:23
Bonjour à tous,

Ok Jean-Claude!

Gampi j'en ai testé mais je ne me souviens plus des grammages... faudrait que je rouvre les tiroirs.

Romain
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
jeudi 7 avril 2016 17:15:41
salut vous tous, ca faisait un moment, ma grandmère disait aussi il a une drôle de touche celui-là...
A JC on disait (dit?) la touche en peinture pour désigner la facon de poser la couleur
et par suite la manière et l'épaisseur de la pâte, le jeu des transparences etc.
Ce qui correspond à nos palla sur washi, qui ont de l'épaisseur.
Et paradoxalement, plus le papier est fin plus l'image semble profonde
car les blancs sont alors donnés par le reflet de la lumière sur le support.
La lumière va dans les deux sens, le sens s'approfondit, enfin vous me comprenez.
D'où le jeu délicat du montage ou non, du collage ou non, du cirage ou non
et de l'oubli de la vitre qui n'est là que pour la protection. Pauvre MonaLisa.
Sans compter qu'on peut varier en retouchant au crayon ou au cyano l'envers,
en posant une feuille d'or, en superposant les couches,
en posant le tirage dans le vent comme Laurent.
A Philippe, peux tu m'envoyer aussi stp le papier des Bechers. (en VO)
A tous pour la prochaine rencontre. R.

ligne de pub: Gampi Gampi Gampishi 30g de Awagami
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
jeudi 7 avril 2016 21:06:42
faut une adresse mail visible.

cordialement

o7 philippe
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
vendredi 8 avril 2016 19:09:19
Je suis également intéressé par ce texte. Par avance, merci.

Philippe
Re: LE TOUCHER EN PHOTOGRAPHIE
vendredi 8 avril 2016 19:25:29
tout est parti.

cordialement

o7 philippe
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