Article "Cadrage et bonne photographie"
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Article "Cadrage et bonne photographie"

Envoyé par Aurélien 
Article "Cadrage et bonne photographie"
mercredi 28 août 2024 10:14:45
Une remarque sur l'article de H. Peyre Cadrage et bonne photographie, lisible ici :

[www.galerie-photo.com]


Extrait :

Comme on sait autour de moi que je fais de la photo, on m'apporte souvent un cliché en me demandant si c'est "une bonne photo". En conséquence des principes que j'ai posés ci-dessus, je commence toujours par demander à son auteur ce qu'il a voulu dire. Ensuite je compare ce que l'auteur a voulu dire à ce que la photo a l'air de dire. En rapprochant les deux j'arrive à peu près à dire enfin si la photo est bonne ou ce qui peut être amélioré.


Cette méthode d’évaluation s’est généralisée dans le monde de la photographie depuis une trentaine d’années, elle porte en elle le passage de l’art conceptuel où l’intention est autant sinon plus importante que la forme.
Il faut désormais que le photographe ait une intention qu’il puisse d’abord formuler avec des mots et que cette intention soit lisible en image dans sa photo pour qu'on en juge rapidement la qualité.

Il y a un double paradoxe dans cette situation qui fait un peu sourire après l'échange sur Velazquez sur un autre fil.
Premièrement le photographe est tenu à une formulation claire de son intention. Le cas de figure où ses mots seraient impuissants à la décrire, dévaluerait son travail. Le discours sur la conceptualisation, pourtant en dehors de l’image, est donc central (comme en art conceptuel).
Deuxièmement, cette méthode place le lecteur/évaluateur en incapacité fondamentale de retrouver de lui-même l’intention de l’auteur, c’est à dire seul face à l’image ; et fait de lui un aveugle fondamental qui regarde d’abord avec les oreilles.

Si cette méthode d’évaluation fonctionne pour les œuvres conceptuelles, elle ne peut avoir une portée universelle.
Pendant des siècles les artistes n’étaient pas obligés à tenir un discours sur leurs intentions, comme c’est le cas aujourd’hui. Le silence de l’artiste était au contraire vu comme le signe que l’œuvre était suffisamment puissante pour exister sans lui, ni sans aucun autre support, comme le plus souvent le cas au musée.

La définition de l’art comme étant un objet sensible conçu par l’artiste avec une une intention que le spectateur peut retrouver en s’y confrontant, est en perte de vitesse dans un monde toujours plus pressé. Les photographes n’ont pas à le comprendre : le discours est devenu une obligation qui s'est imposée, et en conséquence logique la revendication d’art conceptuel se diffuse et se généralise ;-).
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
mercredi 28 août 2024 10:55:04
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
mercredi 28 août 2024 12:51:06
Cela est peu ou prou ce que disait Picasso.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
mercredi 28 août 2024 17:58:15
Bonjour

@Robert
Que disait Picasso s'il vous plaît ?
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
mercredi 28 août 2024 18:17:40
LT78 écrivait:
-------------------------------------------------------
> Bonjour
>
> @Robert
> Que disait Picasso s'il vous plaît ?

On a l'embarras du choix :

[www.yaya-peintures.fr]
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
mercredi 28 août 2024 20:02:01
Photographier (peindre, écrire etc…) c’est chercher… Si au passage on prends un risque on peut même être un artiste. Si notre oeuvre trouve quelque part un écho elle peut même avoir un sens.
Bref je partage les remarques d’Aurélien.

Gabriel
gabrielramon.com
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
mercredi 28 août 2024 20:15:34
Bonsoir Aurelien,

J’ai lu avec grand interêt votre publication de ce jour.

 « Putain pour une fois que je comprends plus de 50% des mots d’un sujet dans Esthétique & Autres Discussions… je m’offre une deuxième pinte à Edgar Quinet ! »

Alors je suis allé relire l’article d’Henri Peyre. Je ne vous cache pas que je suis un peu surpris de votre postulat de départ.
En effet, l’extrait que vous citez n’arrive qu’au 7eme paragraphe.

Et surtout, l’article d’Henri s’ouvre, une fois tous les préalables posés, sur :

« N'importe quelle photographie mène à un nombre infini d'interprétations, plus exactement à autant d'interprétations qu'il y a d'observateurs, simplement parce que personne n'a la même culture, et donc pas les mêmes outils d'interprétation. »

Partant de mon postulat qui est qu’Henri est une personne dont la culture photographique est immense (genre à des années lumières de la mienne) ; je ne doute pas un instant qu’il comprenne instantanément ce qu’a voulu exprimer le détenteur de la photographie.

Je ne doute pas non plus que celui-ci, reconnaissant le savoir d’Henri vienne en connaissance de cause le solliciter.

Ou alors c’est l’idiot du village qui a vaguement entendu parler des connaissances d’Henri.

Mais dans ce cas, Henri en tirerait-il des généralités pouvant faire l’objet d’un article de fond dans GP ? Ce serait faire insulte à notre intelligence. Non ?

Donc, la question est de savoir quelles conclusions nous pouvons en tirer. Et sans parler pour lui-même, je vois deux solutions possibles.

Soit il trouve la photo sans intérêt et auquel cas il s’agit d’une pirouette pour éviter de dire :

« Coco ton truc c’est de la merde »

Mais je n’y crois pas trop parce que cela ne semble pas cadrer avec son caractère.

Ou alors…

L’enseignant qu’il est ne prends jamais de sommeil et rempli son rôle qui est d’aider les gens à se poser des questions pour tirer le club vers le haut.

J’ai souvenir, d’avoir présenté un jour une image à un ami du forum. Je m’étais donné beaucoup de mal (dans le sens où elle comptait beaucoup pour moi) pour la tirer chez un autre ami du forum (je sais j’en ai plusieurs, et je profite de cette intervention pour les remercier infiniment de ce cadeau qu’ils m’ont fait en me donnant leur amitié : elle compte énormément pour moi).

Cette image amenait chez moi de l’émotion. Et cet ami*, me l’a techniquement détruite. Il avait raison. Elle souffrait d’un défaut d’éclairage flagrant que je n’avais pas repéré à la prise de vue mais qui m’a donné beaucoup de mal au tirage (genre oui la Tri-X encaisse beaucoup de diaph et non le papier pas plus de cinq…).

Mais cette image est toujours accrochée chez moi. Et je la regarde toujours avec le plaisir et l’émotion qu’elle m’a donné à l’époque. Et pourtant, il me suffit de traverser deux pieces pour revoir le sujet de départ.

Tout cela pour dire que la confrontation est toujours enrichissante et que le questionnement d’Henri est peut-être justement ce que cherche la personne avide de son avis.

J

*Je déteste cordialement tous les habitants d’Auberchicourt !



Modifié 1 fois. Dernière modification le 28/08/24 20:19 par Ventdesable.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
mercredi 28 août 2024 20:17:48
Si Robert passe par là, je veux bien sa réponse.

Sinon, merci beaucoup à Aurélien pour le partage de ses réflexions vraiment intéressantes.
Une question me vient à l'esprit : quelle autre méthode evaluative peut on employer en art ?

Bonne soirée
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
mercredi 28 août 2024 22:21:41
Picasso disait, à propos du cubisme,pas particulièrement de ses productions,que on n'avait pas besoin de savoir ce que cela représentait. On apprécie ou pas. Pas besoin de légende.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
mercredi 28 août 2024 23:08:36
Ventdesable écrivait:
-------------------------------------------------------

> Donc, la question est de savoir quelles
> conclusions nous pouvons en tirer. Et sans parler
> pour lui-même, je vois deux solutions possibles.
>
>
> Soit il trouve la photo sans intérêt et auquel
> cas il s’agit d’une pirouette pour éviter de
> dire :
>
> « Coco ton truc c’est de la merde »
>
>
> Mais je n’y crois pas trop parce que cela ne
> semble pas cadrer avec son caractère.
>
> Ou alors…
>
> L’enseignant qu’il est ne prends jamais de
> sommeil et rempli son rôle qui est d’aider les
> gens à se poser des questions pour tirer le club
> vers le haut.
>
> J’ai souvenir, d’avoir présenté un jour une
> image à un ami du forum. Je m’étais donné
> beaucoup de mal (dans le sens où elle comptait
> beaucoup pour moi) pour la tirer chez un autre ami
> du forum (je sais j’en ai plusieurs, et je
> profite de cette intervention pour les remercier
> infiniment de ce cadeau qu’ils m’ont fait en
> me donnant leur amitié : elle compte énormément
> pour moi).
>
> Cette image amenait chez moi de l’émotion. Et
> cet ami*, me l’a techniquement détruite. Il
> avait raison. Elle souffrait d’un défaut
> d’éclairage flagrant que je n’avais pas
> repéré à la prise de vue mais qui m’a donné
> beaucoup de mal au tirage (genre oui la Tri-X
> encaisse beaucoup de diaph et non le papier pas
> plus de cinq…).
>
> Mais cette image est toujours accrochée chez moi.
> Et je la regarde toujours avec le plaisir et
> l’émotion qu’elle m’a donné à
> l’époque. Et pourtant, il me suffit de
> traverser deux pieces pour revoir le sujet de
> départ.
>
> Tout cela pour dire que la confrontation est
> toujours enrichissante et que le questionnement
> d’Henri est peut-être justement ce que cherche
> la personne avide de son avis.

LT78 écrivait:
-------------------------------------------------------
> Si Robert passe par là, je veux bien sa
> réponse.
>
> Sinon, merci beaucoup à Aurélien pour le partage
> de ses réflexions vraiment intéressantes.
> Une question me vient à l'esprit : quelle autre
> méthode evaluative peut on employer en art ?

Bonsoir,

H. Peyre décrit une relation où d'emblée la question est "Qu'avez-vous voulu dire ou exprimer ?".

Cette relation est aujourd'hui la norme au dépend d'une autre situation : le lecteur proposerait de vérifier auprès de l'artiste qui lui montre son travail, si dans ce qu'il voit il reconnaît son intention.
Évidemment ça demande beaucoup plus de travail, ce n'est pas "instantané", et plus risqué pour le lecteur qui peut se tromper complètement, ou pour l'artiste qui peut vérifier que son travail ne peut être compris par quelqu'un dont il fait confiance au regard.
Dans ce cas de figure je n'ai jamais constaté qu'une photo pouvait être sauvée après coup par une explication aussi habile soit-elle de mes intentions.

Quand on lit : "L'art contemporain tient pour acquis qu'une bonne œuvre se fait par collaboration entre artiste et spectateur.", il faut comprendre la citation de Marcel Duchamp "C'est le regardeur qui fait le tableau.".
Cette idée a ouvert la voie à un art où le sens de l'œuvre est remplit par le regard du spectateur qui vient y projeter tout ce qu'il veut.
Pour ma part l'absence de déclaration d'intention, n'est pas obligatoirement l'absence d'intention, et on doit préserver la possibilité qu'un artiste s'exprime mal avec les mots (ou le refuse) et très bien avec les images !
Et ce n'est pas pour réactiver le mythe de l'artiste sauvage ;-)



Modifié 4 fois. Dernière modification le 28/08/24 23:21 par Aurélien.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
jeudi 29 août 2024 07:53:25
Merci à Robert et Aurélien.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
jeudi 29 août 2024 08:38:58
merci Nestor pour ce lien
Nestor Burma écrivait:
-------------------------------------------------------
> [www.google.com]
> v=cb00e98615192aee&rls=en&sxsrf=ADLYWIITVqnlvRR8Q1
> 0CLIPIYEcal_sS1w:1724835265577&q=art+pari%C3%A9tal
> +mains&udm=2&fbs=AEQNm0CbCVgAZ5mWEJDg6aoPVcBgTlosg
> QSuzBMlnAdio07UCId2t1azIRgowYJD0nDbqEJMVw8rHb1W2uD
> g6FcI5d8mLT3cHmLoRURQaSmyXeXfPsb-UctOal01tYZ0TilWC
> AFQWYrjqwJdUGr_RS5451sw7TYqP6PtLqXV-ehFnXFEud_L9bX
> diV3Kb8E7hCn5Dkf1UkQG&sa=X&ved=2ahUKEwiV0bOKqJeIAx
> VETaQEHfF4HuoQtKgLegQIFRAB&biw=1505&bih=745&dpr=1

De Pablo Diego José Francisco de Paula Juan Nepomuceno María de los Remedios Cipriano de la Santísima Trinidad Mártir Patricio Ruiz y Picasso, je cite deux citations :
"Un tableau ne vit que par celui qui le regarde."
"Qui voit la figure humaine correctement : le photographe, le miroir ou le peintre ?"
il faut les deux
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
jeudi 29 août 2024 08:40:29
Aurélien écrivait:
-------------------------------------------------------

> Pour ma part l'absence de déclaration
> d'intention, n'est pas obligatoirement l'absence
> d'intention, et on doit préserver la possibilité
> qu'un artiste s'exprime mal avec les mots (ou le
> refuse) et très bien avec les images !

Je partage ce point de vue
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
vendredi 30 août 2024 10:53:06
Bonjour Aurélien,

D'abord un grand merci pour cette relance d'esthétique sur le forum !

Je ne me reconnais pas dans ce qui tu as dit de ma position.

Sur Duchamp, j'ai déjà exprimé assez clairement ce que je pensais dans l'article [www.galerie-photo.com] .
Je pense qu'on peut y lire assez clairement ma position par rapport à l'art dit contemporain que je considère comme un art social de colonisés (au machinisme et à l'américanisme).

Pour moi l'art est une question de jouissance individuelle. On le devine dans cette analyse de Duchamp.
Cela se voit mieux dans plusieurs articles que j'ai pu écrire là-dessus
J'en rappelle deux des plus simples, courts et lisibles :
[www.galerie-photo.com]
[galerie-photo.com]

Pour moi la réussite d'une œuvre d'art est question de fulgurance dans l'opposition de logiques.
Quand il s'agit de donner une opinion sur la réussite ou pas d'une de ses photos à quelqu'un qui me la demande je ne sais pas, a priori, quoi répondre.
J'ai naturellement une petite idée personnelle : par rapport à l'opposition fulgurante des logiques, mon critère, dans lequel je vois la seule définition objective possible du Beau, qui est la seule chose qui compte pour moi en photo, je sais tout de suite ou pas si j'avais fait cette photo, ce que j'aurais à en penser.

Mais là il s'agit de donner son avis à quelqu'un qui ne recherche probablement pas la même chose que moi. Si je veux lui donner un avis éclairé, il est important que je sache ce qu'il a voulu obtenir. A l'aune de ces critères objectivés, je pourrais lui dire avec beaucoup d'honnêteté si le résultat est loin ou proche de ce qu'il a tenté d'atteindre et pourquoi. On ne terminera pas fâchés. On aura appris tous les deux, moi un peu plus qui il est, et lui probablement qu'il peut regarder son travail avec un peu plus de lucidité.
On ne peut pas juger quelque chose autrement qu'en mettant d'abord en place des critères. Les critères sont toujours mieux acceptés s'ils sont produits par celui qui demande le jugement.
C'est difficile de mettre en place ces critères hors les mots, dans une conversation.

La question intéressante, que tu évoques, de savoir si on fait une image parce qu'on ne peut pas dire avec des mots, et dès lors de réfuter les mots quand ils essaient d'attraper une image, n'a pas beaucoup de résonance pour moi. Quand tu travailles dans la fulgurance des oppositions de logiques, peu importe que cette fulgurance soit en mots, en sons, en images ou quoi que ce soit d'autre. Tout est bon pour l'expression et le Beau dépasse largement la question du véhicule employé, me semble-t-il.

Je termine en disant que je n'ai jamais trouvé que les philosophes connus aient traité correctement la question du Beau. Le seul qui ait introduit quelque chose de valable, m'a-t-il semblé, est l'écrivain Robert Musil. J'avais fait un article là-dessus : [www.galerie-photo.com]. Sa force, même s'il est parfois un peu pâteux dans le raisonnement, est d'avoir démontré que "ça marche" en particulier dans certaines des nouvelles qu'on trouve dans le recueil Oeuvres Pré-Posthumes. Les philosophes sont souvent trop occupés à bétonner leur propre système pour admettre ou même comprendre la mécanique oppositionnelle du Beau.
La recherche de Musil autour de l'Autre Etat dans l'Homme sans Qualités sonne un peu comme ta remarque sur les mots et leurs limites.
Pour aller plus loin que Musil, en étant encore plus Nietzschéen que lui, on pourrait faire une généalogie de la philosophie mais aussi de la science sous l'angle de la fulgurance des logiques opposées. J'ai tendance à croire qu'on découvrirait que le Beau (ainsi défini) est le moteur des meilleures intuitions.



Modifié 1 fois. Dernière modification le 30/08/24 10:57 par henri peyre.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
vendredi 30 août 2024 13:00:17
L'intention est toujours là comme postulat de départ dans la démarche photographique. Mais souvent il se passe quelque chose, il faut être présent, sentir le moment et déclencher. Une photographie est la somme d'un lancer de hasards saisis au vol, le tout est de bien saisir la balle au rebond.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
vendredi 30 août 2024 13:21:05
Une chose est sûre : moins il y a d'intention et plus on a besoin du hasard ;-)
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
vendredi 30 août 2024 16:13:07
Lumières éternelles écrivait:
-------------------------------------------------------
> L'intention est toujours là comme postulat de
> départ dans la démarche photographique. Mais
> souvent il se passe quelque chose, il faut être
> présent, sentir le moment et déclencher. Une
> photographie est la somme d'un lancer de hasards
> saisis au vol, le tout est de bien saisir la balle
> au rebond.

Depuis le big bang les hasards s'enchainent et si à un moment donné il est possible d'avoir une volonté, il ne faut pas laisser passer cette occasion.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
vendredi 30 août 2024 19:13:40
henri peyre écrivait:
-------------------------------------------------------
Bonjour Henri,

Merci pour ta relance.

> réfuter les mots quand ils essaient d'attraper une image,
> n'a pas beaucoup de résonance pour moi.

Ce n'est pas ce que j'ai dit. Pour moi la photographie ou l'image élargie à la peinture, vise dans ses ambitions à l'autonomie et donc au langage qui est propre au medium.
Il est question d’organiser l’autonomie de l’œuvre : de la concevoir comme un objet qui se suffit à lui même pour rencontrer le regard de l’autre. Dans ma pratique, cette ambition est centrale (la forme qui s’en rapproche le plus en littérature est le poème).
Dans ce cas de figure qui, pendant quelques siècles été la norme, le langage des mots ne précède pas celui de l'image.

Comme tout le monde je suis contraint à la prose d'introduction à mon travail, sans flagornerie je pense avoir acquis les codes de l'exercice. Mais avec l'acquisition est venu une question sur la valeur réelle de mon travail, c'est à dire sa valeur autonome, dans le silence du regard du spectateur.
C’est une nuance avec le être compris dont tu parles, personnellement j’ai renoncé a être compris il y a longtemps, et accepté que le malentendu est partout et qu’il est parfois même très productif.
Le connais-toi toi même est un préalable simple et compliqué, un peu comme l'épluchage d'un artichaut : au début on tire les grosses feuilles et on pense que ça va aller assez vite, mais au fur et à mesure qu'on avance les feuilles deviennent plus petites et se multiplient jusqu'à devenir d'innombrables fils, comme autant d'œuvres en étant optimiste ;)

Certaines œuvres comme celles de Rothko ou les papiers découpés de Matisse sont intraduisibles, la couleur pure qui absorbe celui ou celle qui regarde, organise une expérience de l'image que peut être la poésie seule pourrait traduire.



Modifié 3 fois. Dernière modification le 30/08/24 19:31 par Aurélien.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
vendredi 30 août 2024 19:27:39
Aurélien écrivait:
-------------------------------------------------------
> henri peyre écrivait:
> --------------------------------------------------

> Dans ce cas de figure qui, pendant quelques
> siècles été la norme, le langage des mots ne
> précède pas celui de l'image.

En fait si pendant des siècles l'intention picturale ou graphique se formalisait par le verbe, et après accord entre les partis en présence, l'œuvre pouvait être réalisée ou pas.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
vendredi 30 août 2024 19:35:20
Nestor Burma écrivait:
-------------------------------------------------------
> Aurélien écrivait:
> --------------------------------------------------
> -----
> > henri peyre écrivait:
> >
> --------------------------------------------------
>
>
> > Dans ce cas de figure qui, pendant quelques
> > siècles été la norme, le langage des mots ne
> > précède pas celui de l'image.
>
> En fait si pendant des siècles l'intention
> picturale ou graphique se formalisait par le
> verbe, et après accord entre les partis en
> présence, l'œuvre pouvait être réalisée ou
> pas.

Oui c'est vrai, et les grandes œuvres ont détourné ce postulat. Un bon critère pour séparer le bon du moins bon ;)
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
vendredi 30 août 2024 19:54:36
Aurélien écrivait:
-------------------------------------------------------
> Nestor Burma écrivait:
> --------------------------------------------------
> -----
> > Aurélien écrivait:
> >
> --------------------------------------------------
>
> > -----
> > > henri peyre écrivait:
> > >
> >
> --------------------------------------------------
>
> >
> >
> > > Dans ce cas de figure qui, pendant quelques
> > > siècles été la norme, le langage des mots
> ne
> > > précède pas celui de l'image.
> >
> > En fait si pendant des siècles l'intention
> > picturale ou graphique se formalisait par le
> > verbe, et après accord entre les partis en
> > présence, l'œuvre pouvait être réalisée ou
> > pas.
>
> Oui c'est vrai, et les grandes œuvres ont
> détourné ce postulat. Un bon critère pour
> séparer le bon du moins bon ;)

Je n'en crois pas un mot, les grandes œuvres de commande ont toujours eu un "verbe" d'intention, ce n'est pas une question de qualité mais de contexte social, les œuvres construites librement sans rien dire à personne sont plutôt rares ou modernes et encore pas toutes, loin de là.



Modifié 3 fois. Dernière modification le 30/08/24 19:57 par Nestor Burma.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
vendredi 30 août 2024 20:02:51
Nestor Burma écrivait:
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> Aurélien écrivait:
> --------------------------------------------------
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> > Nestor Burma écrivait:
> >
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> > -----
> > > Aurélien écrivait:
> > >
> >
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> > > -----
> > > > henri peyre écrivait:
> > > >
> > >
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> > >
> > >
> > > > Dans ce cas de figure qui, pendant quelques
> > > > siècles été la norme, le langage des
> mots
> > ne
> > > > précède pas celui de l'image.
> > >
> > > En fait si pendant des siècles l'intention
> > > picturale ou graphique se formalisait par le
> > > verbe, et après accord entre les partis en
> > > présence, l'œuvre pouvait être réalisée
> ou
> > > pas.
> >
> > Oui c'est vrai, et les grandes œuvres ont
> > détourné ce postulat. Un bon critère pour
> > séparer le bon du moins bon ;)
>
> Je n'en crois pas un mot, les grandes œuvres de
> commande ont toujours eu un "verbe" d'intention,
> ce n'est pas une question de qualité mais de
> contexte social, les œuvres construites librement
> sans rien dire à personne sont plutôt rares ou
> modernes et encore pas toutes, loin de là.


Ce n'est pas la question de ce qui précède l'œuvre, mais ce qui précède sa présentation.

Dans le cas de l'art commandé par l'église catholique, oui le verbe est le préalable. Mais la forme le dépasse dans celles qui nous intéressent comme le tableau de Velazquez commenté sur un autre fil. La facture, la composition deviennent le sujet.
C'est ici qu'on entre dans le langage, là où le tableau est autonome.



Modifié 2 fois. Dernière modification le 30/08/24 20:05 par Aurélien.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
vendredi 30 août 2024 20:09:59
Aurélien écrivait:
-------------------------------------------------------

> > > Oui c'est vrai, et les grandes œuvres ont
> > > détourné ce postulat. Un bon critère pour
> > > séparer le bon du moins bon ;)
> >
> > Je n'en crois pas un mot, les grandes œuvres
> de
> > commande ont toujours eu un "verbe"
> d'intention,
> > ce n'est pas une question de qualité mais de
> > contexte social, les œuvres construites
> librement
> > sans rien dire à personne sont plutôt rares
> ou
> > modernes et encore pas toutes, loin de là.
>
>
> Ce n'est pas la question de ce qui précède
> l'œuvre, mais ce qui précède sa présentation.

C'est plutôt la question de l'intention, c'est ce que propose Henri Peyre, et ce type de "verbe" qui précède l'œuvre se nomme lettre d'intention et c'est une pratique qui est toujours d'actualité.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
vendredi 30 août 2024 20:18:52
Nestor Burma écrivait:
-------------------------------------------------------
> Aurélien écrivait:
> --------------------------------------------------
> -----
>
> > > > Oui c'est vrai, et les grandes œuvres ont
> > > > détourné ce postulat. Un bon critère
> pour
> > > > séparer le bon du moins bon ;)
> > >
> > > Je n'en crois pas un mot, les grandes œuvres
> > de
> > > commande ont toujours eu un "verbe"
> > d'intention,
> > > ce n'est pas une question de qualité mais de
> > > contexte social, les œuvres construites
> > librement
> > > sans rien dire à personne sont plutôt rares
> > ou
> > > modernes et encore pas toutes, loin de là.
> >
> >
> > Ce n'est pas la question de ce qui précède
> > l'œuvre, mais ce qui précède sa
> présentation.
>
> C'est plutôt la question de l'intention, c'est ce
> que propose Henri Peyre, et ce type de "verbe" qui
> précède l'œuvre se nomme lettre d'intention et
> c'est une pratique qui est toujours d'actualité.


L'intention de Velazquez, il aura fallu des siècles pour la dévoiler, et l'épisode biblique n'aura pas été d'un grand secours dans cette élucidation ;)
La lettre d'intention est inexistante dans la grande majorités des œuvres du Louvre ou d'Orsay, que faut-il en conclure ?
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
samedi 31 août 2024 05:39:16
Aurélien écrivait:

> L'intention de Velazquez, il aura fallu des
> siècles pour la dévoiler, et l'épisode biblique
> n'aura pas été d'un grand secours dans cette
> élucidation ;)
> La lettre d'intention est inexistante dans la
> grande majorités des œuvres du Louvre ou
> d'Orsay, que faut-il en conclure ?

Je n'ai toujours pas compris, après la discussion sur VELAZQUEZ et les explications de Gabriel RAMON, quelle était l'intention du peintre en réalisant cette œuvre. Je n'ose pas penser que le peintre aurait réalisé un subterfuge pareil dans une peinture qui était destinée à être vendue (a une époque ou il n'était pas encore peintre officiel de la cour).
Les peintres sont ils obligés de dévoiler la lettre d'intention qu'ils ont reçu d'un futur acquéreur / financeur lors de l'exposition de l'œuvre ?
Comment affirmer qu'il n'y avait aucun document de ce type (oral ou écrit) préalable à la réalisation ?
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
samedi 31 août 2024 08:33:06
Pour Aurélien,
Merci pour ces éclaircissements. Je crois bien voir ce que tu veux évoquer avec les peintures de Rothko ou les papiers découpés de Matisse. J'aime également particulièrement ces auteurs, et dans le Matisse de la fin on comprend particulièrement ce que tu évoques ; j'ai toujours trouvé le saut du Matisse des aquariums et des petites fenêtres ouvrant sur des intérieurs confinés au Matisse des vastes plages de couleurs particulièrement parlant !
Toutefois si Matisse était devenu demander à Henri Peyre ce qu'il pense de ses papiers découpés, il me semble que je j'aurais pu m'assurer, avec des mots, que l'auteur avait voulu atteindre une sorte de plénitude de la couleur et du trait éternellement neuve et fraiche. Je lui aurais alors confraternellement tapé dans le dos et pu le rassurer : "oui, ça marche et c'est magnifique !"
Rien à mon sens n'aurait empêché qu'il me parle d'un au-delà des mots : tu le fais bien, et je te comprends. Les mots ne font pas qu'enfermer, il peuvent aussi suggérer.

Cette conversation me fait penser que tu as peut-être une relation assez particulière d'amour-haine au langage qui interfère dans ce que tu évoques. Nul doute que si je te voyais je te ferais causer un peu là-dessus !

Je reprendrais bien également la question de LT 78, que je trouve intéressante : "Une question me vient à l'esprit : quelle autre méthode évaluative peut on employer en art ?"
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
samedi 31 août 2024 09:28:43
Aurélien écrivait:
-------------------------------------------------------

> L'intention de Velazquez, il aura fallu des
> siècles pour la dévoiler, et l'épisode biblique
> n'aura pas été d'un grand secours dans cette
> élucidation ;)

Juste une enquête policière, qui dévoile surtout notre point de vue contemporain.

> La lettre d'intention est inexistante dans la
> grande majorités des œuvres du Louvre ou
> d'Orsay, que faut-il en conclure ?

Ce n'est pas parce que ces lettres n'existent pas aujourd'hui quelles n'ont jamais existé.
Tous les portraits, tous les sujets religieux, toutes les madones ont des lettres d'intention.
Toutes les grandes scènes de bataille ont des lettres d'intention.

Finalement il ne reste que quelques natures mortes qui peuvent se passer de lettre d'intention.

Mais pour ma part ce n'est pas le fond de la question, la question qui me semble trop contemporaine c'est de retravailler les lettres d'intention pour les faire passer au premier plan. Ce qui conduit à se tourner vers les œuvres en expert et non en amateur, l'expertise est la sale manie de notre époque, ne plus savoir simplement goûter.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
samedi 31 août 2024 10:37:02
Citation

Ce qui conduit à se tourner vers les œuvres en expert et non en amateur, l'expertise est la sale manie de notre époque, ne plus savoir simplement goûter

+1

Paraphrasant librement JP Sartre

“L’art existe d’abord, se rencontre, surgit dans le monde, et il se définit après […] L’art n’est rien, il ne sera qu’ensuite, et il sera tel qu’il se sera fait.”
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
samedi 31 août 2024 11:00:59
henri peyre écrivait:
-------------------------------------------------------
> Pour Aurélien,
> Merci pour ces éclaircissements. Je crois bien
> voir ce que tu veux évoquer avec les peintures de
> Rothko ou les papiers découpés de Matisse.
> J'aime également particulièrement ces auteurs,
> et dans le Matisse de la fin on comprend
> particulièrement ce que tu évoques ; j'ai
> toujours trouvé le saut du Matisse des aquariums
> et des petites fenêtres ouvrant sur des
> intérieurs confinés au Matisse des vastes plages
> de couleurs particulièrement parlant !
> Toutefois si Matisse était devenu demander à
> Henri Peyre ce qu'il pense de ses papiers
> découpés, il me semble que je j'aurais pu
> m'assurer, avec des mots, que l'auteur avait voulu
> atteindre une sorte de plénitude de la couleur et
> du trait éternellement neuve et fraiche. Je lui
> aurais alors confraternellement tapé dans le dos
> et pu le rassurer : "oui, ça marche et c'est
> magnifique !"
> Rien à mon sens n'aurait empêché qu'il me parle
> d'un au-delà des mots : tu le fais bien, et je te
> comprends. Les mots ne font pas qu'enfermer, il
> peuvent aussi suggérer.

> Cette conversation me fait penser que tu as
> peut-être une relation assez particulière
> d'amour-haine au langage qui interfère dans ce
> que tu évoques. Nul doute que si je te voyais je
> te ferais causer un peu là-dessus !
>
> Je reprendrais bien également la question de LT
> 78, que je trouve intéressante : "Une question me
> vient à l'esprit : quelle autre méthode
> évaluative peut on employer en art ?"


Avec Rothko et le Matisse de la fin, les œuvres se passent très bien d'introduction, mais pas forcément de mots qui pourraient suggérer la sensation esthétique qu'ils provoquent. C'est une question de sens : commencer par regarder pour ensuite traduire ses sensations. Ces œuvres sont suffisamment achevées pour qu’on y retrouve ce que l’artiste veut atteindre.
L’expérience de l’œuvre n’est pas alourdie ou même empêchée par une verbalisation. Au musée je ne prends jamais les audioguides, les déclarations d'intention ne sont pas nécessaires, aujourd'hui elles sont imposées. Je me demande simplement ce qui a bien pu se passer ;)

La génération de Giacometti, Rothko ont vu arriver l'émergence de l'art conceptuel, et la primauté du discours sur l’œuvre. Christopher Rothko raconte que son père en était très malheureux, et avait fini par se murer dans le silence avec un sentiment de grande incompréhension.
Il y encore quelques années on ne demandait aucun préalable aux photographes, ils devaient juste présenter leur travail.
Quand on commence par regarder on est tout de suite dans l’œuvre, la conversation, l’échange ne peuvent être fructueux qu’après le travail du regard, ça ne fonctionne que dans un sens. Quand on commence par la verbalisation, l’échange commence par un exercice d’habileté réthorique, qui ne préjuge en rien de la qualité du travail présenté.
Je n’ai pas de haine vis à vis des mots, mais j’ai fini après plus de trente ans de pratique a avoir une grande méfiance à l’égard de la question : qu’avez vous voulu faire ou exprimer ?
Pour moi, si la question arrive c’est qu’il y a un problème, soit dans l’œuvre, soit chez celui qui la pose.

Les échanges les plus intéressants que j'ai pu avoir étaient avec les artistes, parce qu'on est tout de suite dans le travail du regard et pas dans la médiation.



Modifié 1 fois. Dernière modification le 31/08/24 11:08 par Aurélien.
Re: Article "Cadrage et bonne photographie"
samedi 31 août 2024 11:09:31
Aurélien écrivait:
-------------------------------------------------------

> Il y encore quelques années on ne demandait aucun
> préalable aux photographes, ils devaient juste
> présenter leur travail.

Les photographes étaient encore des artisans à cette époque, presque des artisans d'art, pas encore des artistes.
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