de « Norma »
« terre misérable »Ah ! Je comprends mieux pourquoi il fallait
absolument trouver autre chose pour la distribution internationale de ce film !
Alors attaquer ce film sur sa crédibilité n'a aucun sens, c'est n'avoir rien compris au film, c'est vraiment le cas de le dire...Je ne suis pas surpris de cette réaction ;-) et je me réjouis de voir la discussion s'animer un peu.
Je persiste et je signe.
Ce film est, à mes yeux,
invraisemblable du début jusqu'à la fin.Pas ennuyeux (2h23 tout de même), certes. Il y a de belles images de paysages, certes.
Quand on connaît un peu l'Islande sur le terrain et qu'on y a pris soi-même des photos enthousiasmantes, (comme Daniel B., que je salue au passage), il en faut un peu plus pour se laisser impressionner par des images d'Islande, si belles soient-elles.
La vraisemblance de l'histoire n'est donc sans doute pas un critère de jugement, au prétexte que le metteur en scène est aussi un « artiste plasticien » ?
L'accumulation de détails documentaires authentiques est en totale contradiction avec l'invraisemblance criante de l'histoire, du début à la fin.
Le personnage principal sur-joue de façon pénible. Il n'est pas crédible une seule seconde.
On lui fait porter, à ce malheureux pasteur-rigide-austère et néanmoins dingue de photo, tous les péchés de la Couronne danoise depuis la « reprise en mains » violente du XVI
e siècle, où la question religieuse en Islande n'était pas la seule question,
(assassinat de Jón Arason en 1550), mais également l'interdiction de commercer avec tout autre pays que le pays oppresseur.
Si c'est l'une des grilles de lecture pour
comprendre le film, alors on se croirait dans un film-militant du siècle dernier, dans lequel le message à faire passer est bien plus important que la vraisemblance de l'histoire.
Cela dit, je trouve assez normal que les chevaux tiennent une place plus importante que la photographie dans un film censé se passer en Islande à la fin du XIX
e siècle.
La première fois que je suis allé en Islande (c'était il y a 42 ans...) je me suis très vite heurté à cette dure réalité, c'est à dire que le terrain, en particulier dans la partie sud de l'Islande (le film est censé se dérouler quelque part (** note 1) dans le sud-est), est plutôt fait pour les déplacements à dos de cheval plutôt qu'à pied. Les distances énormes à couvrir dans des terrains malaisés, entre les mousses pleines d'eau (auxquelles film rend hommage, encore un beau détail documentaire) et les vieilles laves qui coupent les chaussures et tordent les pieds, sans parler des gués plus ou moins difficiles à passer, tout cela milite en faveur du cheval.
Dans le film, il y a une scène extraordinaire de passage de gué à cheval, je m'incline devant la réalisation, mais cela, hélas, ne rend pas le film, dans son ensemble, plus crédible.
Normalement, ce film devrait être un parfait repoussoir-anti-touristes, mais je ne me fais aucun souci : avec
une fréquentation de 1,7 million de touristes en 2016, chiffres qui, à cause du Covid,
tombent à 700000 en 2021, on reste tout de même très au-dessus du nombre d'habitants :
376248 selon le-wiki-de-service. (**note 2).
J'imagine aisément que l'impact de son film sur le tourisme en Islande est le dernier des soucis d'un créateur libre et indépendant comme Hlynur Palmason, à qui je souhaite une longue et fructueuse carrière même si je n'ai pas aimé ce film.
c'est n'avoir rien compris au filmDébat classique à propos de l'art contemporain : quand on ne comprend pas une oeuvre, la faute en incombe
forcément au public inculte qui regarde, au spectateur inculte au cinéma, certainement pas à l'artiste-créateur lui-même.
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de Daniel B. :
l'utilisation de focales plus courtes aurait permis de mettre encore plus en valeur les paysages.C'est un aspect du film dont nous n'avons pas encore discuté : le choix délibéré d'un format non-panoramique du genre 4:3, comme au temps des Frères Lumière.
Déjà lorsque le film « Cold War » de Pawel Pawlikowski était sorti en 2018, en format 4:3, la presse avait parlé de « format carré ». Dans « Godland », en plus, les coins de l'image sont arrondis comme en 1900.
Pourquoi pas ; du coup, ce format 4:3 nous donne quelques panoramiques lents et interminables (eh oui, 2h23 ...), où il y a du bon et du moins bon.
Le premier de ces panoramiques est insupportable, il se termine sur le visage du méchant pasteur couché dans la nature sauvage.
Le 2
e panoramique, en revanche, est très lent et très beau, il essaie de nous faire ressentir l'atmosphère d'un mariage de village islandais à la fin du XIX
e siècle. Un moment de grâce, sans réserve.
Je ne suis jamais allé en Islande avec un Rolleiflex, mais je ne sais pas quelles images j'aurais pu prendre avec un
vrai format carré 1:1, car de nombreux sujets du paysage islandais semblent
exiger un format allongé.
(** note 1) Inutile de chercher le lieu où se passe l'action ; le film est un assemblage de scènes prises dans des endroits fort éloignés les uns des autres, mais c'est la règle au cinéma, de faire croire à une unité de lieu par la magie de la prise de vue et du montage.
Notons néanmoins que la vidéo (à mon avis, absolument sans intérêt) de
l'éruption récente du printemps 2021 dans la péninsule de Reykjanes, se situe, dans le monde réel, à plusieurs centaines de kilomètres du « sud-est » de l'Islande où est censée se dérouler l'action. Je connaissais déjà ces images d'éruption récente ... et, malheureusement, insérées dans un film qui se passe à la fin du XIXe siècle, cela dé-crédibilise encore un peu plus le film à mes yeux ... nettement plus que de ne pas avoir vu le couchage du collodion sur les plaques. Mais zut, j'oubliais : la vraisemblance ici n'a pas d'importance !
(** note 2) Pour mémoire, en 2018,
il y a eu 89 millions de visiteurs en France, pour un pays de 67 millions d'habitants.
E.B.Modifié 3 fois. Dernière modification le 20/01/23 10:21 par Emmanuel Bigler (modérateur).