Bonjour à tous !
Reçu ce matin ce très beau livre :
« Capa in color », textes (en anglais) de Cynthia Young, photos de Robert Capa
Delmonico books - Prestel
Publié à l'occasion d'une exposition à l'International Center of Photography, NYC - USA - (janvier - mai 2014)
ISBN 978-3-7913-5350-0De Capa, on a surtout en mémoire du 24x36 en noir et blanc ; ce livre nous présente une anthologie du travail de Capa en couleurs entre 1938 et 1954 ; et nous montre un très gand nombre d'images prises avec un Rolleiflex.
À part quelques images prises en 24x36 sur Kodachrome dès sa commercialisation en 1938 et quelques rouleaux de K-135 pris par Capa pendant la guerre (en particulier le débarquement allié en Sicile en '43), Capa a utilisé également la chambre de presse Graflex et la Linhof Technika avec des plan-films Kodachrome en formats 3x4 pouces et 4x5 pouces. Il a utilisé également le Rolleiflex, très probablement avec des Ektachromes, car pour autant que je me le rappelle, le Kodachrome n'était pas disponible en rouleaux 120 entre son introduction en '38 et sa fugitive version moderne K-64 - 120 tout à la fin du siècle dernier.
Beaucoup des images présentées sont issues de reportages commandés par des magazines anglophones dans la période 1947-1954 (il y a néanmoins quelques images prises pour « Paris-Match »), et au moins la moitié des images présentées dans le livre sont carrées, trahissant l'usage du Rollei-bi. Pas de mystère, les techniques de photogravure de l'époque, surtout en couleurs, avaient un peu de mal à exploiter le 24x36.
On voit plusieurs images avec Capa en action, Rolleiflex en mains, et le Rolleiphile précautionneux se réjouit de voir le fameux reporter de guerre utiliser l'étui de cuir !! Comme quoi, le Leica ou le Nikon du photo-journaliste, toujours utilisé à nu (pour se distinguer de l'amateur frileux, évidemment ;-)) et parfois bardé de gaffeur, est une invention relativement récente ;-)
À signaler un reportage à Moscou pour le magazine « Illustrated », en '48, avec des textes de John Steinbeck. L'association d'un des écrivains étazuniens les plus célèbres et de l'un des plus célèbres photo-reporters, le tout financé par un magazine ... ah ! c'était mieux avant ;-)
À signaler également que Capa ne dédaignait pas, loin de là, la photo de célébrités. On le voit en action dans de très chics stations de skis suisses (** note 1), il y a une superbe image où le voit en train de viser (le Cervin ??) pour faire un calendrier suisse avec une Technika à main levée (1950) ; et dans la journée, il est sur les pistes et photographie, entre autres, la famille royale des Pays Bas.
Mais il y a également la côte d'azur, et puisque Picasso est à l'honneur à Paris aujourd'hui, le bouquin nous montre des images fameuses du Père Pablo à la plage à Vallauris en famille.
Comme quoi, à l'époque, on pouvait photographier tranquillement les célébrités au ski ou dans les cocktails mondains, cela n'émpêchait pas, hélas, de sauter ultérierement sur une mine pendant un reportage de guerre.
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Les Rolleiphiles seront aux anges, bien qu'il soit difficile de les épater avec des images carrées parfaitement nettes, ils seront admiratifs de la qualité technique des images carrées présentées dans le bouquin. Certes, il y a un travail de retouche numérique parfois titanesque (voir plus bas) pour reconstituer les couleurs perdues des ektas, mais la netteté des images et n'a pas été inventée sur l'ordinateur de la maison d'édition en 2014.
Une courte note technique nous confirme ce que nous savions déjà, mais il est toujours bon de croiser les sources et de confronter les témoignages. Les Kodachromes, à quelques exceptions près (erreurs probables dans le très complexe procédé de développement, pour quelques bobines seulement) se numérisent avec très peu de corrections de couleur ; les couleurs des Kodachromes sont restées suffisamment présentes pour que les images puissent être publiées telles quelles en 2014. Rien de tel, hélas, avec les ektas antérieurs à 1954, dont l'état de conservation colorimétrique soixante années plus tard va de la petite dérive facile à corriger, jusqu' à l'effacement total des bleus et des verts, ne laissant au numérisateur contemporain aucune autre possibilité que la reconstitution des bleus
a posteriori par le contexte (p.ex. : le ciel) ou la confrontation avec l'image imprimée à l'époque dans les magazines, en particulier pour retrouver les verts.
Pour le reportage moscovite,
(la Comtesse me souffle : un moscovite en Russie à Bruxelles) pas de problème avec le rouge de rigueur chez les Soviets en '48, ce sont les rouges d'origine ;-)
Bref, voilà un très beau bouquin que j'ai acheté par correspondance au Royaume Uni et surtout pas directement aux États-Unis
(nos lecteurs québécois, que je salue au passage, auront, à l'évidence, un point de vue totalement opposé), afin de maintenir les frais de port à un niveau acceptable. Le bouquin est arrivé ce matin dans un superbe sac postal bleu réutilisable !
Bonne lecture !
(** note 1 : moi, pour les sports d'hiver, comme le grand Capa, je préfère la Suisse ; parce qu'en France, ou bien on est affligé par la vulgarité ambiante, ou bien il y a trop de snobs)
(** note 2 : en apprenant que Capa avait travaillé à la chambre de presse pendant la guerre, la Comtesse s'est souvenue de cette anecdote « Le 10 juin '44, le grand Capa avait fait tester tous les septums du recteur de Sainte Mère Église. »)
E.B.Modifié 1 fois. Dernière modification le 25/10/14 12:24 par Emmanuel Bigler.