Je viens de voir l'exposition Lens Drawings organisée par Jens Hoffmann.
Ta lecture est belle et optimiste et l'expo y répond en partie. L'accrochage présente des photographes vivants qui ont "contribués de façon significative à la réflexion actuelle autour du médium", dans un contexte de déferlement d'images "provenant essentiellement de téléphones portable où il est très difficile de déceler une étincelle d'originalité".
En marge de la sélection de tirages, des appareils argentiques moyens et chambres 4x5 sont exposés sous vitrine, avec un premier problème : certains appareils pliants sont très anciens et n'ont pas de rapport avec le matériel utilisé par les photographes exposés, et j'ai eu le net sentiment que le commissaire d'expo a chercher à vieillir artificiellement la pratique des artistes présentés.
En somme l'idée est de dire que la démocratisation sans précédent de la photographie, et le flot immense de publication d'images sur internet capturées avec des téléphones portables épuisent la valeur du médium en tant qu'art . Cette exposition montre donc les "reliques d'un temps révolu" sur un plan technique et esthétique, " lens drawings" est le titre parfait : dessiner avec une lentille , mais dans la grande tradition "obsolète" de l'art sérieux, déconnecté de la réalité quotidienne et démocratique du médium.
On est donc sur un double inversé (sûrement par l'effet de lentille) de la petite provocation d'Eric Kessels à Arles (qui ressemble à un règlement de compte avec le milieu artistique auquel appartiennent les artistes de Lens drawings) et son tas de photos qui nous dit que la photo c'est "ça" , ici Jens Hoffmann affirme que la photo ce n'est plus "ça". L'un et l'autre veulent croire à une évaluation artistique qui se mesurerait à sa pratique d'usage dominante, comme si utiliser le médium photographique c'était forcément produire de l'art, ce qui me semble très discutable. J'ai l'impression de revivre les disputes d' il y a vingt ans où Nuridsany et Durand s'écharpaient pour savoir qui des deux avait prononcé le premier la mort du médium. Un peu avant on avait pu entendre que la philosophie était morte, Deleuze avait répondu qu'il n'y avait pas de mort à l'horizon mais que des fossoyeurs qui se déclarent ...
Modifié 2 fois. Dernière modification le 20/07/13 09:26 par Zoran.