Lien entre le sténopé optimum et le réseau zôné de Fresnel.
On peut également faire le lien entre le réseau zôné de Fresnel et le sténopé optimum.
Sténopé à gros trou : il y a de la lumière qui passe, mais l'image est de plus en plus floue au fur et à mesure qu'on élargit l'ouverture.
Donc on réduit l'ouverture, l'image devient moins lumineuse (à f/500, on s'en douterait) et moins floue, mais à un certain diamètre, le flou augmente à nouveau à cause de la diffraction qui devient prépondérante.
Le réseau zôné de Fresnel permet dans son principe d'avoir une espèce de sténopé focalisant nettement plus lumineux que le sténopé optimum et avec un effet de focalisation améliorant en principe la finesse des détails dans l'image.
Pour cela, M. Augustin Fresnel a montré par le calcul qu'il suffisait de laisser passer la lumière au-delà du diamètre du sténopé optimum, à travers des anneaux concentriques, ou zônes, dont les diamètres suivent une progression bien calculée. La condition de fonctionnement du réseau est que lorsqu'on passe d'un anneau au suivant, la distance parcourue par le rayon diffracté entre son point de départ depuis l'un des anneaux et le point de focalisation souhaité, augmente de une fois la longueur d'onde. On cache donc les anneaux pour lesquels la distance serait égale à un nombre entier de longueurs d'onde, plus une demi longueur d'onde.
Du coup le réseau se comporte un peu comme une lentille mince, mais, hélas, pour une toute petite partie de la lumière. La partie la plus importante passe tout droit et vient polluer l'image formée par l'effet de lentille. De plus on peut montrer que le réseau zôné le plus simple, par transmission, avec les cernes transparents ou opaques tracés sur un film ou une plaque de verre, se comporte également comme une lentille divergente !
Le réseau zôné peut être à centre clair, à centre noir ou toute disposition intermédiaire, du moment que la progression des diamètres des anneaux suit la bonne loi. Le sténopé optimum pour une distance de projection "d" correspond à un trou dont le diamètre est celui d'un réseau zôné à centre clair de focale "d".
Par exemple pour un réseau zôné de Fresnel de 100 mm de focale à la longueur d'onde de 0,55 micron au centre du spectre visible, le diamètre du trou central d'un réseau à centre clair est de 0,33 mm. La formule empirique de Stroebel pour le sténopé optimum pour d = 100 mm de distance, c'est (d[en mm])
1/2/(28) = 10/28 = 0,36 mm.
Mais on n'est pas obligé de fabriquer un réseau zôné à centre clair, voir le document pointé plus haut, vous avez toute latitude entre centre clair et centre noir et tous les dessins intermédiaires, tous ces réseaux auront la même focale de 100 pour une lumière à 0,55 micron. Et tous donneront les mêmes images affreuses.
Si le sténopé donne des images plus plaisantes, c'est parce qu'il y a moins de lumière parasite.
En principe la résolution de l'image donnée par le réseau zôné, c'est la distance entre les milieux des deux derniers anneaux périphériques, qui deviennent de plus en plus fins au fur et à mesure qu'on s'éloigne du centre. On atteint effectivement cette limite de résolution, qui peut être 10 fois meilleure qu'avec un sténopé optimum, mais ce gain est masqué par la superposition à l'image nette d'une image floue et de lumière parasite directe en proportion énorme par rapport à cette pauvre image focalisée.
Certes le gain en luminosité du réseau zôné est considérable. Par exemple en reprenant la valeur de 0,33 - 0,36 mm, si le diamètre extérieur du réseau zôné est de 3 mm, il y a un gain d'un facteur 100 en surface totale, donc un facteur effectif de 50 si on tient compte des 50% d'occultation dans le réseau. Un facteur x50 c'est un gain en luminosité de près de 6 diaph. Mais hélas, l'essentiel de la lumière est sous forme de lumière parasite et non pas sous forme de lumière focalisée utile formant l'image.
De plus, le chromatisme longitudinal d'un réseau zôné de Fresnel est effroyable, puisque la focale est égale à r
12/(2 λ) où λ est la longueur d'onde de la lumière, et r
1 est un paramètre caractéristique du dessin (égal au diamètre du trou central du réseau zôné à centre clair).
Comme la longueur d'onde λ varie entre 0,4 et 0,7 micron pour ce qui est effectivement visible par l'œil humain, on voit que la meilleure focalisation va se former à une distance qui varie de plus ou moins 25% par rapport à celle du centre du spectre, donc la prétendue focale de 100 mm varie entre 75 et 125 mm selon les couleurs !!
Une véritable catastophe que même le très modeste objectif de Wollaston, une lentille simple de forme optimale diaphagmée par devant, est loin d'atteindre. Jamais le chromatisme longitudinal d'une lentille simple en verre n'atteint ces proportions terrifiantes de plus ou moins 25% sur la focale !!
Bref, ami lecteur, la fabrication d'un réseau zôné de Fresnel est passionnante, son principe de fonctionnement nous sidère quand on sait qu'il a été inventé il y a deux siècles et qu'au-delà de la simple question de terminologie francophone, il est juste et bon de créditer Augustin Fresnel de son invention.
Toutes ces raisons nous poussent évidemment à en fabriquer un et à faire des tests.
Pour terminer : quel est le lien entre le réseau zôné de Fresnel et la lentille de Fresnel ?
Il y a en fait peu de liens, à part que les deux objets ont été inventés par le même savant, et qu'ils se présentent tous les deux comme une lentille focalisante plate (« plate », en anglais, veut dire une plaque ; ici, une plaque plane ;
zone plate est donc une plaque à zônes).
La lentille de Fresnel n'a aucune obligation d'avoir ses rayons successifs qui suivent telle ou telle loi du moment que l'inclinaison prismatique des cernes en verre ou en plastique rabat les rayons là où il faut, par un effet de micro-prisme. Le réseau zôné de Fresnel fonctionne par interférences constructives de rayons diffractés, la loi de distribution r
n = r
1 n
1/2 est au contraire impérative pour que la focalisation ait lieu à une distance d = r
12/(2 λ).
Mais la quantité de lumière effectivement focalisée est très faible ; pour y remédier, on peut combiner les deux principes de la réfraction et de la diffraction, pour réaliser des micro-lentilles de Fresnel extra-plates, à la fois diffractives et réfractives, avec 100% d'efficacité dans la bonne focalisation.
Mais ceci est une autre histoire !
E.B.Modifié 1 fois. Dernière modification le 28/03/15 13:30 par Emmanuel Bigler (modérateur).